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toute la hideur, chang'ment d'décor, toute la poisse
on aime conduire la nuit, conduire on n'a pas froid
on aura pitié d'eux mais sans les aimer: comment aimer qui que ce soit
sans déchoir?après tout on n'est rien, rien que la nuit qui tombe
ou qui tombait d'ailleurs, que c'est beau quand elle tombe
d'ailleurs beau c'est qu'elle tombe, elle est tombée d'ici, déjà depuis longtemps
alors on attend là, là que le jour se lève, et c'est ça qui fait peurheureusement il pleut, ça me rassure un peu
ça fait longtemps déjà, je suis dedans la tombe
on finit par s'habituer à ne s'habituer à rien
regarde-moi ne me vois pas - je me love en cette intense cécité-là
cette diaphane cécitéil n'y a d'autre patrie que la langue, le corps-même de l'exil
quelle langue était la mienne? j'allais sur le chemin
j'allais sur le chemin mais il n'y avait pas de chemin
personne ne parlait, j'étais le corps-même de l'exilil fait jour, c'est effroyable
effroyable cette boue d'angoisse et d'allégresse, il fait jour
il fait jour et pourtant c'est la nuit, une nuit en plein jour
c'est effrayant: je suis
je compte la monnaie, je calcule ce que je peux me procurer avec cette monnaie
- c'est donc si difficile que ça, être mort?
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fermer les yeux d'un mort je n'en prendrais pas la responsabilité. j'accorde à tous la nationalité. je me lève tôt matin pour rallumer le feu
je me sens loin de moi et pourtant lorsque je ne me regarde pas, ce n'est pas un autre que moi que je ne regarde pas. du papier, du carton et du bois empilés au foyer
dieu ne se souvenant pas de moi je surfe sur l'oubli. parfois à la place de je je mets nous, on, tu il ou elle. parfois à la place de je je surfe sur l'oubli, je gratte l'allumette
j'aime t'agacer, tel un acupuncteur tard dans la nuit. attendre que le jour se lève en soufflant sur les cendres; prétendre qu'il s'agit de fraises en pissant sur les braises. croire que la vie peut se passer de sens, d'un seul
il va faire froid, très froid. nous nous réfugierons en ce sentiment d'exclusion, ce principe d'abandon. nous éprouverons le bonheur d'être mais de n'en reconnaître la raison nous souffrirons. le jour se lèvera et il sera trop tard - trop tard pour quoi trop tard pour rien
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on reconnait l'homme qui ment à la vérité qui perdure en lui, et le trahit
par exemple quand tu débandes et quel couteau s'affûte en toi - tu me décevrais tant si tu t'avouais heureux
pour te faire pardonner tu me susurres que deux-trois souvenirs suffiront à traverser l'étendue infinie de l'oubli
dont un manquant probablement, mais tu n'en diras rien...on nomme un homme - l'espace qui l'enclot s'en fera t-il seulement l'écho? les rêves
garderont-ils à distance la nuit suffisamment encore - aurais-je le temps de remonter mon froc,
d'un seul coup de briquet contre le vent mauvais rallumer cette clope?
survivre, bien-sûr, oui mais survivre à quoi?
fin de l'hiver
je n'aime plus shubert
- derniers topinamboursles jours rallongent
rétrécissent les rêves
mon esprit s'appauvritdernier tour de manège
je n'aime plus l'hiver
ni les filles du bourg
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c'est seulement comme ça que nous avons tenu: à peine plus légers que soi
la part qui revenait au père fut mangée de bonne heure
puis il fallut se rendre à l'évidence d'une panne de rêve générale - qui se croyait malin faisait passer ça pour de la transparence
qui ne se croyait rien s'en allait comme il était venu, bredouille incirconcistu t'arranges toujours pour t'envoler au moment-même où le ciel se dérobe, disparaissant ainsi des écrans radars en une éclipse standard
or se réduire à son ombre n'impressionne personne, et tu n'évites pas le regard que nul ne t'accorde
il reste tout un monde à détruire pourtant - cela ne te rassure t-il pas au fond?titubant sur l'avant-dernière ligne, l'avant-dernière toujours
comme des points de suspension ratiboisant le silence - quel silence, haletant?
la jambe est là, le pied l'espace - ne manquerait que le pas d'avancer, à contre-courant ou bien même en été, mais non
non on ne veut pas de ça chez nous: chez nous
n'existe pas
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de grandes claques dans les yeux, rien n'a changé: l'air souffle comme avant - frais, rugueux, on peut dire de façon haineuse et dès le commencement déjà, avant même le commencement plutôt, avant que vent ne lève, de grandes claques dans la gueule, tandis que ce qui était ne se différenciait pas encore de ce qui n'était pas, ni la vie de la mort, et que rien ne soufflait ni ne passait sur soi l'ombre d'un doute, le tranchant d'un destin, sans chemin errais-je donc, à moitié moite et dans le préconçu des effrois à venir, leurs fesses de garçon
la dernière gorgée, amère et froide, du café dans la main
ce qui ne mène nulle part, et passe indifférent sous le regard de dieu
sous le pied s'essuie le sol, ce n'est pas là l'envol cependant
cependant je repose, la tasse sur la table, qu'aucune joie ne troubleil vente au dos
des jours blêmes, j'ai du fermer l'esprit
à toute représentation, passer outre les tombes
humaines de rencontre, s'il y eut quelque chose encore
qui put me retenir, la manche entre deux doigts,
une affection d'argile, cheveux et mascara - écoute:
il vente au dos
des jours blêmesle temps serait donc tout ce qu'on ait à perdre, mettons les musiciens de côté: je déteste la musique
dans les chambres une odeur de moisi, parquet ciré jadis, voire autrefois, le drap défait
quelques taches
je ne sens plus mon sexe, je ne ressens plus rien
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la dernière nuit me fut fidèle, membrane qu'on décolle
à même le dos des filles, j'avais prêté mon nom pourtant, je veux dire mon prénom
à des visages secoués de rides, tendus à d'autres horizons ou encore
arrimés à d'autres désertions
et ne me connaissant pasl'engorgée si j'y bois, de ci, de là, nos visions essoufflées...
en marge de quoi, soi, rongé par l'en-dedans, l'ennui sans la substance tu attrapes
la balle quand j'te la lance ou bien le cœur ballant, et n'osant plus tousser,
tu crachotes ces quelques mots d'amour appris sous la menace ou dans l'urgence - trop tard:
la balle roule à côté, s'éteint sur le gazonpersonne
ne t'a dit de venir reprends tes poches, les trous dedans tes poches et tout ce que
tu perdis, crus perdre ou ne trouvas jamais tu sais
ce qu'un ciel insinue quand il baisse les yeux tu sais
qu'il ne faut pas dire adieu avant d'avoir saigné des mains, gravement
des mains, putain...par la pitié
et tout ce qu'il reste de pitié en tout ce qui flotte
pour tout ce qui s'enfonce, par la pitié des hommes, parle-moi - parle-moi
de ces absences nauséeuses, serre-les entre tes cuisses, aspire-les profondément je crois avoir perdu
quelque chose je ne sais quoi
qui traînait là depuis quelques temps déjà - je regardais ailleurs encore
vers la mer probablement
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bien plus loin que la chose tu en conçois l'idée, parfaite et superflue, tu passes doucement le doigt
comme pour en ôter la poussière ou en caresser la surface
quelque chose alors se rend compte de toi tu n'es pas tout à fait sûr
qu'il s'agisse de toi, tu verraset l'amie si doucement m'a, si doucement fermé les yeux
peut-être afin de voir ce qu'il en reste sans la poudre, quelle soif d'ignorance
nous brûle ainsi les tripes, nous retourne le sang c'est le temps des semis, peindre en rose un nuage
ne retient pas la pluieflagrance, simple flagrance - quelque chose m'oublie, dont je ne me souviens pas
la joue contre la gifle
s'est couchée, elle voyage en suspens, un peu comme voyage tout suspens
au fil d'un non-être béat, en représailles disons
que je te mords la languej'installe un trampoline tout au fond de la tombe, j'en écope
la boue des songes, la chiasse ardue, quelques mauvais présages aussi
restés coincés au creux d'une dent, de celles qu'on garde, rancune tenace,
contre l'hideux d'y penser
sans pouvoir y toucher
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c'est la pierre contre la pierre que se produit l'étincelle, n'est-ce pas? la merde contre la merde ne fait que se tenir chaud - ce qui n'est déjà pas si mal après tout.
une sorte d'avion s'est couché sur ma poitrine, lema sabachthani mais non mon petit, prends mon sein, repose ta lourde tête sur la pierre
de l'émigrélema sabachthani mais non mon petit, les lauriers de la déroute, la macabre poupée qui te suce la langue - quelle froide poussière sous les pas de Mashrab!
on ne s'était jamais imaginé vivre tant, le temps nous a eu à l'usure finalement - la province s'enlise dans une sacrée bouillasse...peut-être chez vous les bêtes ne pataugent-elles pas, de pâles roses de neigeux blancs les amandiers saupoudrent-ils les vallées - j'ai la nausée des jours
où possible encore était la grâce, qui nous crochait la patte sur un mauvais chemin de grêles, de maladresses. dieu désormais ne nous sauverait pas; dieu désormais ne nous
pardonnerait
paset si je manquais d'yeux? et si je manquais de sang pour un autre que moi? ou si toute ma vie s'éclaircissait de se réduire à un simple noir-et-blanc?
je n'ai hâte de rien. et puis ça ne me fait plus mal, tout en restant vulnérable au mal. seulement je m'étonne: à quoi aura servi de vivre si l'on meurt sans s'en apercevoir?
somnoler sur la banquette arrière...pas un seul pas et déjà tu t'en vas. tu c'est déjà s'en aller, c'est déjà s'envoler - ne ferons-nous jamais plus que de nous regarder mourir dans les yeux l'un de l'autre?
une chose encore, une dernière chose et je me tais: pourquoi la pluie c'est toujours de l'eau douce, si douce...?
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