•   indépendamment
      du temps qu'il fait, quelqu'un se penche sur mon épaule, je sens une présence
      toute simple, habillée prudemment
      on mettrait un nœud s'il fallait se pendre
      voulant se dépendre, mieux vaut défaire le nœud

     

     

      plier genou plier bagage, s'effondrer
      dans le salut, comme on désespère avec élégance, d'un geste pluvieux
      j'amorce la descente. défense de fumer (exister sans le dire). je m'épelle, je m'interpelle: défense
      de fumer j'ai dit

     

     

      blanche et tranquille, elle meurt d'un signe de croix
      la planche de salut flotte à la limite mais la limite est-ce moi, tendu en bout de souffle, titubant
      sur une autre déroute, au creux d'une autre
      chute?

     

     

      pencher, peut-être
      légèrement de biais, du côté où l'on entend déjà
      gargouiller le déluge; articuler son souffle
      à la charnière des dents, mordre quelque part
      en plein la soif c'est ça
      ou par inadvertance

     

     

    l'ébahissement large


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  •   elle est tellement fatiguée elle dort sans me demander merci
      évidemment que l'on ne mourrait pas si l'on n'était immortels: seule notre éternité peut s'offusquer du temps, présent ou non
      d'un pas subtil, nous mettons-nous hors de portée de route

     

     

      quel est le jour qui t'aime, le jour qui ne te demande rien ni n'exige en retour, les yeux qui clignent enfin
      je n'ai rendez-vous avec personne, m'y rendant d'autant plus présent

     

     

      vivre n'y était pour rien. vivre ne faisait pas réellement la différence. mais vivre semait la folie un peu partout derrière soi
      devant soi vivre dansait, lascive. non, pas lascive: obscène...

     

     

      devoir se justifier d'exister, un luxe qu'on ne pouvait plus se permettre
      un mince matelas à même le sol nous contenterait largement
      dur le sol, léger le rêve. on ne s'aperçoit de rien et c'est tant mieux comme ça

     

     

      se suicider marquait l'allure. il eut fallu des années. or les années, c'est ce dont nous ne disposions plus
      il eut fallu rétrécir un petit peu, rien qu'un petit peu, en se disant par exemple qu'il était déjà trop tard pour ça, pour le reste
      ou pour n'importe quoi

     

     

      pas de confidence sans confident - quoique...
      pas de pardon sans trahison. je marchais je ne dirais pas sans savoir où j'allais: je dirais je marchais sans savoir que j'allais

     

     

      contraint à l'humilité, je me posais la main sur le ventre. ça n'irait pas forcément mieux, mais ça révélait probablement quelque chose
      de moi ou même de moins

     


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  •   l'homme en tant que lieu où dieu se confond à son absence - ce déchirement-là
      le poème engendré par l'assomption de la défaite, tout un passage frayé en
      écartant les croix...

     

     

      cette soif, jamais étanchée
      devant le verre à jamais vide

     

     

      l'homme en tant qu'homme mort
      - sauf, peut-être, son ombre...

     

     

      d'en-haut le temps n'existe pas. je me suis donc accolé aux fesses du destin, ivre d'un accord mineur
      nul, n'étant tenu d'être à l'heure, à quelque heure que ce soit, n'est en retard

     

     

      oui mais non mais j'ai tellement d'amour pour vous que je n'sais plus
      ce qu'aimer signifie
      ou donc le minimum requis

     

     

      s'il ne peut y avoir une mort de plus qu'il n'y a de vies, il y a en plus de la mort autant de vies qu'il y a de vies
      avec la mort au milieu

     

     

      dieu aura pitié de moi - qui d'autre? qui aura suffisamment de larmes pour éponger ma douleur, m'essuyer l'âme?
      moi seul cessera d'avoir pitié de moi-même et l'on fera alors comme si on n'avait rien vu - non mais vraiment rien vu

     

     

       dieu n'est qu'un autre mot pour la confiance. or la confiance ne se mérite pas, elle est par nécessité aveugle. il y a des gens qui courent vers l'est
      à l'ouest, la mer les arrête net

     

     

    entre les gouttes


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  •   quelque chose n'a rien dit et pourtant je n'ai rien dit non plus - ce fut plus fort que moi ce fut
      plus fort que le non-moi aussi

     

     

      cependant quelqu'un chanta. quelqu'un a chanté. quelqu'un
      s'est mis à chanter. tout mon être vibre d'une voix et chanterait encore si l'être
      n'était que voix

     

     

      d'une mystérieuse évidence, d'une déroutante simplicité, j'ai juste fait mon sac ou bien défait le nœud
      personne, sans limite, ne m'attendait

     

     

      je n'ai plus de poésie. mes veines sont à court de poésie. ma mort m'épie là, tapie dans un coin et c'est la mort de tout un chacun, la mort universelle. elle ne me veut pas de mal. je crois qu'elle m'aime
      d'un amour universel

     

     

      je commence à me ressembler dès lors que je détache mon regard d'ici-bas, de moi, et qu'hors condition je m'abandonne à l'inintentionnalité pure de qui simplement
      oublie de mourir

     

     

      je ne m'intéresse pas (moi-même). cette clarté me fascine, émanant de nulle part, en toute part diffuse. je me sens comme un homme qu'on felationnerait  sans qu'il en ait conscience. un rêve érotique sans forme ni contenu. l'idée d'un
      aboutissement parfait

     

     

      le désespoir aura pourtant besoin de moi, au même titre qu'un homme couché implique un homme debout, et le dernier mot
      un avant-dernier mot

     

     

      je reste ahuri face à la mort. je ne me comprends pas. tout semble aboutir à et l'infini commencer dès
      cet homme qui fume...

     


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  •   où trouver nulle part
      le no-man's land en soi
      habiter chez personne, au creux d'une distance froide - froide
      et éberluée

     

     

      il me faut quelque chose à regarder, quelque part vers où tendre le regard, un vide à occuper entre soi et l'infinissable :
      un paysage en vrai

     

     

      croiser l'origine de moi-même ou mourir quelle différence puisque je ne connais pas mon nom - ignorant même
      si quelqu'un m'appelle

     

     

      tout un silence à emplir de son écoute. toute une écoute à
      creuser d'un silence sidéré

     

     

      mille voix ne furent assez. du coup je dus me contenter d'une seule et toute
      petite voix...

     

     

      les pieds dans l'eau les couilles à l'air - je bande pour rien mon dieu, oui, je bande pour rien

     

     

      j'aime le temps de dire vous, pas plus que vous, présence dense
      bien que désincarnée

     

     

      mentir ne cache rien: je me rends à l'ignorance
      la lumière traverse le néant, la lumière perce le néant, la lumière déborde du néant
      sans même lever le petit doigt

     

     

      je ne vois plus un homme je vois un trou
      par où passe le vent, je vois le temps
      passer le temps

     

     

    la forme du vide


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  •   on pense devenir un homme, on ne fait
      que pondre un vide, encore du vide, un cure-dent bien en vue
      au centre de la pièce. mais que croyais-tu donc - qu'un destin
      t'attendait, qui t'aurait pris la main en écartant les poils pour que
      tu jouisses dedans?

     

     

      déjà nous ne rêvions plus que les quinze du mois
      une jambe repliée et l'autre ballante, à repousser le courant
      nous taraudait l'idée d'une intimité fondant comme neige sur le gland
      s'il restait un espoir, l'espoir ne savait plus de quoi...

     

     

      à quelque chose près - une ombre sur le mollet, un cheveu sur la langue...
      s'amincissent les causes et les motifs du mouvement
      en dur, et en cadence, le pied s'enfonce dans le pas
      s'il n'y rencontre un mur, il en défoncera l'image

     

     

      j'ai pied au fond, toujours au fond, et le fond tout au bord
      pris de vertige, épris de nausée pure
      je reviens de vacances juste pour me faire clouer
      à la porte des granges, tatouer
      aux mamelles des anges...

     

     

      quelqu'un chante à ma porte, griffant le lobe de ma conscience en déshérence.
      je ne me résous pas à ÇA, quoi que l'on mette derrière ÇA, devant ÇA je ne simule plus
      l'orgasme ni l'amère grimace, quelque chose m'éradique
      de mon propre visage - un vent mauvais, un clou
      borgne, comme son nom l'indique sur la liste des supplices mentionnés
      au dos du médicament

     

     

      avec acharnement, et guère plus de lumière, ai-je mené ma barque à l'abreuvoir
      une corde de violon en guise de racine, sur laquelle affûter cette farouche mélancolie
      qui enfonce le pouce de l'enfant jusqu'au fond de sa gorge et étouffe ses rêves
      tant qu'ils sont encore tièdes...

     


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  •   ouvertement, ou plus exactement
      tu jouis avec le ventre, le ventre étant
      le lieu où tu demeures vide, un certain temps
      un sanglot s'émoussant, à l'intérieur

     

     

      les bancs, pour ne pas s'envoler, s'agrippent à la terre ferme
      ou plutôt, s'il arrive que je boive un peu plus que de coutume, je m'invente un retour, une route
      récemment sortie de ses gonds, une échappée par le souffle malade
      ou alors je m'ennuie

     

     

      bientôt, nous ne rêverons plus
      et si les fenêtres s'entêtent à grandir et s'élargir, nous ne les ouvrirons plus
      nous les maintiendrons le front bas et d'un mur adjacentes
      à se frotter, grincer et s'user
      contre les verges molles

     

     

      je ne blesse quiconque, je lèche mes plaies c'est tout
      telles qu'elles poussent au bout d'la langue
      du linceul au rideau, tiré sur des rires d'enfant
      comme si ça pouvait rire encore, un enfant...

     

     

      je rectifie ma position, sans m'embarrasser plus
      des signes ostentatoires de l'absence, la trouble monotonie d'heures définitivement creuses
      je m'ouvre un ventre
      pour venir y caresser la tête du monstre qui m'a vu naître, je crois
      je ne pense pas à la douleur, je crois

     

    les unes que les autres


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  •   partir décime le temps présent. je te parle d'un autre port, à l'autre bout d'une autre mer, et d'où tu ne
      pourrais m'entendre

     

     

      car tu ne m'as précisé
      ni l'heure ni le lieu, ce que tu porterais, la façon dont tu te serais coiffée le matin avant de sortir me rejoindre, moi qu'on ne rejoint pas

     

     

      tandis qu'à la pensée de ton pas sur l'eau, le bitume ou toute autre surface praticable, je me sens déjà comme
      défenestré dans le nulle part

     

     

      j'ai faim de loup, de myrtilles et de mort sans douleur. un saut dans l'éternité la briserait-il, ou ne ferait-il qu'en érafler
      l'insalubre apparence?

     

     

      partir maigrit. modestement, qu'attendais-tu de moi? du dé nu le chiffre est resté collé
      sur ma paume

     

     

      rien ne s'habitue. tout comme moi ou à moi. et ça prend désormais la forme sans contour d'un espace nu
      de nos deux nœuds, faisons donc corde lisse

     

     

      j'aurais du me tuer alors, adolescent encore. je n'en avais déjà plus la force. ma volonté avait été brisée. ne m'appartenant pas, je m'étais quitté sans bruit, irrévocablement quitté. il était dès lors
      déjà trop tard

     

     

      en l'espace d'une nuit, sauve-toi...

     


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