• le garçon qu'a perdu son doudou

       la mort planera d'un côté, puis de l'autre, se posera sur ta tête et peut-être entonnera un air pur, un air à la fois intime et inédit
       ou alors rien, passera le temps avec rien, en ne le
       passant pas

     

     

       un ballon. j'ai lâché mon ballon. le ciel l'emporte, je ne sais où, au loin si loin - peut-être même au-delà
       ici le son d'un homme 
       cloche

     

     

       j'ai toujours mal à un endroit ou à un autre, et puis ça se guérit peu à peu, ça se guérit tout seul. peu à peu la mort sort de moi
       un mort c'est un homme dont toute la mort est sortie, un homme que la mort a quitté pour de bon

     

     

       un pas de trop. j'enlève un pas de trop. je promets à la gamine de la ramener chez elle - antigone, me dit-elle, je m'appelle antigone, j'habite un peu plus bas juste en face du tabac
       on retire un pas et l'immense s'étale, comme s'il ne lui manquait que ça, un pas en moins, pour s'immiscer
       entre soi et son ultime raison d'être

     

     

       je la prends sur mes genoux, la joue la touche, l'apaise. puis m'approche de la fenêtre à l'infini morose. je rejette avec répugnance l'idée que tout ne fasse qu'un, et réalise à quel point la mort seule rend la vie supportable, la déracinant et la privant de toute pesanteur...

     

     

       quelquefois j'ai mal ailleurs aussi, quelque part en dehors de moi. ainsi mon corps s'élargit-il, ainsi englobe t-il l'au-delà de lui-même
       quelquefois jouit une femme sur le bout de ma langue, mais je sais que ce n'est pas de moi qu'elle jouit
       je me berce d'illusions sans doute, en rêvant d'allumettes s'enflammant sans qu'on les gratte...

     

     

       c'est très simple au fond: juste un garçon
       à qui l'on a cassé son jouet, un garçon
       dont on a arraché les pattes ou la tête de l'ours, un garçon
       qu'a perdu son doudou...
       et tout le reste ne consistera qu'en une progressive complexification, l'écho ricochant à l'infini d'une faille originelle, d'un silence creusé à même la chair de l'être...

     

       le garçon qu'a perdu son doudou

    « elle cousant et moi dormantles animaux font partie de la veillée »

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