• saigner à froid

      maintenant que je ne suis plus là, que je n'habite plus les lieux, tu pourrais venir me voir
      tu m'apporterais un quelconque recueil de poèmes, même si tu sais à quel point la poésie me dégoûte, mais tu ne saurais pas quoi d'autre
      tu ne saurais pas qu'à un homme tel que moi on peut sans gêne offrir
      un géranium

     

     

      les hommes qui m'ont vu naître sont morts, ou se masturbent non stop dans les recoins douteux
      quelques uns ne me reconnaissent pas
      quant à ceux qui se masturbent, j'imagine qu'ils font ça dans les règles, me regardant mourir
      ou plutôt faire semblant

     

     

      je craignais tellement m'être trompé d'adresse, et ça me rassurait au fond d'alunir là où je ne me sentais pas le bienvenu, d'où il faudrait tout honteux rebrousser chemin, navré d'avoir osé, d'avoir interrompu quelque chose comme le sinistre et banal
      coït d'exister

     

     

      se sentir étranger c'est tout un art: d'abord, il faut que personne ne s'en aperçoive; ensuite, que chacun le soupçonne
      mais au-delà, très au-delà, il faut soi-même s'appeler sans jamais espérer
      de réponse, d'écho, ni même s'être entendu, de si loin fut-il

     

     

      j'ai du parler tout bas, j'ai du parler trop haut aussi - en tout cas j'ai chanté faux
      si j'avais survécu à chaque fois que j'étais mort je n'aurais jamais su comment me débarrasser de moi - et ça encombre tellement, un soi
      alors que faire semblant de jouir, ça ne prend guère de place...

     

    saigner à froid
      
      

    « clamser c'est cosmonauteje pisse debout »

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