•   qu'est-ce que tu fais là, mort ou vivant, dans ce lit qui n'est pas le tien, sous ces draps restés froids
      je sens mon œil fondre, je ne me souviens pas avoir ri, enfant, je t'escorte à travers la nuit noire
      la pluie cependant n'a pas gercé, elle a simplement lavé le présent de ses croutes,, ses miasmes
      et ses chiasses

      .

      j'ai déblayé, déblatéré - que reste t-il?
      la vie n'importe comment, la vie qui fiche le camp - et alors?
      alors c'est beau, tellement beau d'avoir été, et que n'importe quoi soit
      tu n'es pas vraiment laide - même toi a le droit de te trouver jolie aux yeux d'un poisson mort tel que moi

      .

      il faudrait se montrer plus concret, établir une transparence entre le fait brut et l'universel abstrait
      or je n'habite ni l'un ni l'autre, le niveau d'eau d'un horizon
      et tout l'amour du monde ne me ferait pas plus que jouir

      .

      ce n'est pas la sincérité que je cherche, mais donner cours à ce qui se dit quand rien ne se cherche
      vivre hors-passion se révélait tout aussi périlleux que d'en vivre. le feu les cendres, éteindre et allumer, le sexe de la femme ou bien celui de l'homme...
      je ricoche sous le sommeil, ma pensée s'est enfuie, plus loin encore plus loin - sans donner suite

      .

      je n'avais rien à dire, alors naturellement je t'ai tourné le dos, ou j'ai fait semblant de t'écouter
      tu étais dieu, la femme idéalement, ou mon chien séculier - tu n'étais rien et qu'importe le son
      qui court à reculons
      à reculons jusqu'à Meudon

     

      la pluie n'a pas gercé


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  •   pas un souffle, pas un dolmen - un chant si simple berce cet univers non-prémédité, lequel s'effondrerait si je fermais les yeux
      rien qu'un instant.

      .

      admettons que je sois la voix du paysage. admettons que le paysage s'abîme en la pensée de soi. admettons que je vive encore quelques années. admettons que je sois mort depuis quelques années
      - qui fit bouillir de l'eau?

      .

      qui raye l'eau sur le disque? épuisante condition humaine, il va falloir recommencer - recommencer à sautiller sous les lampions, à bourgeonner du cul, à réduire les nageurs en cendres, les carpes au silence
      et le silence à soi, petit silence à soi.

      .

      je ne suis pas prêt. je ne suis prêt à rien, tout m'est fatal. un petit œuf pondu. un œuf de quoi on n'en sait rien - la mort entre autres sert à nous révéler ces choses-là. un petit œuf tondu - non la mort ne sert à rien
      la mort de quoi on n'en sait rien.

      .

      je ne pensais à rien; rien ne me pensait vraiment. pauvre tuile, quelques fleurs au balcon, le cœur irrémédiablement vide. la mer remuait encore en tout ce qui bougeait, ou même respirait
      en ce qui reposait.


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  •   la moitié des gens nus, l'autre moitié dérivant vaguement vers le nord
      le romantisme incongru des parapluies
      leur paraissant pour le moins suspect

      .

      la pluie me gronde, la pluie se terre en moi
      la bonté et la grâce peu à peu reconquièrent le terrain
      les ronces sur le quai, celui-ci ou d'en face
      se serre tout contre moi la femme d'un autre, toujours d'un autre

       .

      ces muettes désolations accueillirent l'esprit
      nous étions deux à nous tendre la main, dans l'espoir peu sensé un jour de nous réconcilier
      l'un seulement survécut
      et put poser genou à terre

       .

      j'ai vu s'empourprer le cœur de l'arbre, cette ombre gigantesque, ce lien utile
      une bruine d'ineffable douceur retrace dans la chair le chemin clandestin de dieu
      elle remonte ses chaussettes après l'amour. elle remonte toujours ses chaussettes après l'amour
      elle n'enlève pas ses chaussettes pour l'amour. d'ailleurs ce n'est pas nécessaire

       .

      ceux qui survécurent, les quelques uns qui atteignirent la limite
      ne se retournèrent pas
      se délestant du poids de toute question, de toute réponse, ils purent reprendre leur souffle
      et déposer leur nombril parmi d'autres petits cailloux
         le jour semblait vouloir s'attarder indéfiniment
      quant à ceux morts en chemin, ils resteraient sans sépulture...

     

      l'illettrisme en milieu rural


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  •   le chien se lève. c'est quelque chose de mystique. et ça se passe à l'est
      il faut crever le chien avant qu'il ne nous bondisse dessus, l'œil dément, le sexe luisant
      il faut crever le chien. c'est quelque chose de mystique. même si ça pue horriblement
      il y a quelque chose d'impitoyablement humain dans ce refrain

      .

      j'ai mis ma tête de loup, j'ai mis ma tête de fou
              qui scrute
              avec des yeux de l'au-delà
              la pitié d'ici-bas.
      j'ai mis ma tête de loup, de loup sans pitié, sans méchanceté, sans amour non plus
      j'ai mis ma tête de loup, je l'ai fourrée entre tes cuisses, et j'ai léché
      sachant bien qu'à la fin ta mort serait la mienne,
      ton âme à quelques grammes près

      .

      ce n'est qu'un arbre mort
      ou si je suis l'arbre mort, ce n'est que le ciel gris au travers et par-delà l'arbre mort
      les filles ne pleurent plus, elles s'en foutent, le doigt rivé où ça les brûle (je l'ai vu, de mes propres yeux vu!)
      ce n'est qu'un arbre mort, précises-tu tout à fait inutilement,
      le vertige d'un ciel gris, un ciel gris sans orgasme


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  •   reparaissent les oiseaux d'hiver. on est tranquille pour un moment
      de l'épaisseur du silence ou de la banalité du sentiment, je sens qu'ils me rassurent au fond
      on décroche un pendu et on l'assoit à table. enfin quelqu'un de digne avec qui boire
      sans chichis ni fausse familiarité

      .

      tourne le vent, change le temps. je n'ai pas beaucoup dormi cette nuit encore. rien de quoi se plaindre finalement
      à un moment donné, j'ai du penser que je basculais de plus en plus en dieu, et que mon absorption définitive en lui se ferait naturellement
      c'était une bonne pensée, une sensation douce. je n'en ai pas souvent des comme ça

      .

      c'est un ciel si calme, un ciel si vide, le ciel livide d'un soir de novembre
      c'est un ciel sans ciel, un vide si vide qu'aucune histoire ne l'affecte
      c'est la fin du jour, la frêle éternité de l'entre-deux, la frontière naturelle où je convulse
      - on n'existe pas pour soi, non plus

      .

      il pourrait se mettre à pleuvoir
      il serait tout à fait insignifiant qu'il se mette à pleuvoir
      c'est pourtant à cette insignifiance-là que nous puisons le réconfort et le vertige - le brin de nausée faisant toute la saveur
      de notre dérive immobile...

     

      l'accent grave

     

     


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  •   tu as parfois une tête de chien.
      il faut survivre
      dis-tu
      comme à regret

      .

      fuyons ensemble
      moi ici et moi là-bas
      fuyons ensemble et laissons moi tranquille
      laissons-le vide

      .

      pendant tout un instant il n'y eut dans l'univers
      nulle douleur,
      pendant tout un instant il n'y eut dans l'univers
      nulle lumière,
      ce fut le calme plat
      le mur sans brique ce fut
      l'éveil à rien

      .

      d'emblée s'avancent, s'avancent vers moi
      celui qui revient trop tard, et de trop loin
      celui qui revient en boitant, la voix éteinte, et le regard fermé
      celui enfin qui de toute évidence
      ne revient pas, ne reviendra pas

      .

      de ce côté-ci de la frontière, un paysage quelconque, la route de s'en échapper
      de ce côté-là de la frontière, un autre paysage quelconque, étrangement ressemblant - la route peut-être d'un revêtement plus performant, la conduite plus souple...

      .

      il s'en allait, déjà
      comment lui dire, ou comment se dire
      qu'il ne reviendrait pas
      et qu'il faudrait pourtant
      l'attendre

      .

      ne pense à rien, conduis
      sur la même route, à travers le noir intense, traverse
      la même absence de paysage, prolonge indéfiniment
      ce révérencieux naufrage...

     

      sous un nuage très simplifié

     


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  •   j'avais suivi un faon. je ne sais pas si je suis devenu l'herbe qu'il mange ou le bois sur son crâne,
      ou si son odeur encore prend forme en ma mémoire...

     

      tourner en rond sur soi creuse l'espace où sombrer

     

      les majorettes, qui tue les majorettes?
      elles tombent dans mon rêve, les majorettes
      - et mon rêve les détrousse

     

      je suis parti loin d'ici ou de toi: se perdre ouvrait les espaces vierges

     

      il y a ces choses si vraies qu'on n'oserait les dire. il y a ces choses si vraies qu'on n'a pas le poumon d'en mourir...

     

      je suis là
      comme un ballon laissé vide dans la cour du centre aéré
      avec la peur au ventre que n'importe quel sale gosse se souvienne de moi

     

      j'ai semé le vent. j'ai récolté le vent. je m'en vais maintenant me reposer

     

      j'ignorais que c'était dieu. je croyais qu'il s'agissait juste d'une caissière assise derrière ce bout de tapis roulant, faisant semblant de sourire en s'enquérant de ma carte de fidélité...

     

      je monte sur tes épaules. pour voir le paysage; ne pas toucher le sol. que je dois être lourd...

     

      je l'ai déclouté. soigné les plaies, appliqué un baume cicatrisant. humecté les lèvres. peut-être pleuré un peu...
      - voilà tous mes péchés

     

      il faut de grosses bottes, de grosses rames et un cœur très lourd pour traverser l'hiver
      - à moins qu'il ne se mette à neiger...

     

      je n'arrive pas à croire au néant. on dirait qu'il n'est là que pour que je n'arrive pas à croire en quoi que ce soit d'autre

     

      toute la pureté de la vie, je l'ai comprise
      puis je suis allée me noyer

     

      allez viens on s'en va
      on s'en va de toute façon
     
     


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  •   si Il, ou Elle, est morte, pourquoi moi ne mourrais-je pas?

     

      sors de nous, sors de nos consciences - que nos consciences, fluides, ne s'amarrent à rien

     

      tout ça c'est pour rien. c'est la tête d'Attila arrimée sur le rail omnibus

     

      et tu craches sur le bout...

     

      le salut ne sauve de rien. on entend
      par chaque pore de mon corps
      hurler l'exil

     

      je crois n'être ici que pour sauver un être - un seul- de moi-même, et de mon désir exterminateur

     

      j'ignorerai demain, que faire, où aller, qu'être
      à main nue, je retirerai de l'essaim
      la seule guêpe endormie...

     

      il y aurait cette boite à bonbons
      tu serais l'un des bonbons
      j'en prendrais un au hasard

     

      je ne veux pas te dégouter de vivre, mais juste récupérer un doigt, pour dessiner sur la vitre embuée
      un soleil
      qui n'existe pas

     

      je m'éparpille, et chacun retrouve sa nature propre
      - ne reste là que ce qui n'y vint jamais

     

      un jour, alors que j'aurai perdu tout courage, toute gloire et dignité, je m'abandonnerai enfin
      au bonheur

     

      il faut encore perdre son âme - même ça.
      passe un cycliste sur la plage...

     

      passe un cycliste


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