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c'est comme s'il n'y avait personne, comme si tu passais au-dessous de réverbères grésillants, n'éclairant plus que leur propre douleur
comment oublier ce qui n'existe pas, ce qui ne s'est manifesté que pour divulguer son absence infinie
et irrévocablej'ai peur avant toi
et j'ai peur après toi aussi
j'ignore de quoi - du fait même de l'ignorer probablement
il y a du linge étendu là dehors. il sèche et il trempe, alternativementressorts usés de l'émotion, avant toi j'ai peur, et après toi
c'est plus simple comme ça, la simple mise à nu, ne ressembler à rien
flottant sur l'absence-mèreà pic en soi
que vais-je réveiller?
l'air manque or je ne suffoque pas, je respire sans air
peut-être suis-je mort après tout, la bouche en peau de bouche
et la nuit perpétuellele miracle
n'aura pas eu lieu
les vacances touchent à leur fin, la fin aussi touche à sa fin
les jambes s'en vont de leur côté, je me retourne dans mon sommeil
je me retourne à tout hasard, mais rien ne sert de simuler:
les miracles, ça
n'existe pas
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elle ne me parle plus
je la soudoie je la tords, je la supplie je l'essore, je n'en tire plus un mot, n'en soutire plus une larme
c'est jeter sa ligne à la marre du chemin, y regarder le temps passer sans qu'il ne morde - d'ailleurs je ne pense pas avoir mis d'appât
l'appât est-ce moi, s'entortillant sur son hameçon comme si elle n'avait que ça à faire, à relever les jours tombés
sur leur derrièreune autre paire de manches
celles-ci ont rétréci sur mes bras dénudés, mes bras décharnés, si frêles digues pudiquement dressées devant la peur
à la courte paille chaque paille nouvellement tirée sera la plus courte, et ce jusqu'à la fin des temps. quelqu'un sous mes yeux se suicidera, j'y veillerai
suffisamment en tout cas pour craindre d'être le prochain sur la liste des incriminésje ne réside en rien, c'est ma part de hasard
le ballon qu'un enfant a malencontreusement lâché (petit flocon de main) et que le vide aspire - ce serait trop demander de dire qu'un vent l'emporte, fut-il mauvais
c'est pire que ça encore: continuer de rendre visite à un vieillard tout en sachant qu'il n'en a plus pour longtemps
et que ça ne le soulage de rien, de ce rien sans appel dont il n'y a pas lieu de se releveril ne s'agit pas d'une certitude: juste d'une ronde absence de douleur faisant tache d'huile sur ce qu'il nous reste de conscience, c'est à dire de nous-mêmes, buvards saturés d'encre, de signes que leur superposition a fini par rendre incompréhensibles
à vivre à deux on s'ennuie moins, à trois personne ne veut la place du milieu dans le lit et l'on se voit contraint de sacrifier au hasard et le plus faible, l'un avant l'autre alors que le dernier le rescapé devra supporter seul
la croix, le poids d'un lit, le délitement de soi et il n'est plus aucun reposje ralentis le temps. je le creuse, le vide. je creuse une tombe au-dedans, une tombe infinie, un infiniment vide dans l'infiniment vide
puis vient le temps où le temps est en trop, la conscience inutile souffrance. il faut s'éteindre alors, éteindre le cœur de soi, fermer les yeux de la mémoire et fermer ceux de l'oubli
il n'y a rien après, après c'est déjà maintenant. il n'y a rien maintenant, maintenant coule en jamais dans un sens ou dans l'autre
du moins rhétoriquementmille pommes de grâce, tombées sous le pommier des cendres...
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à cette heure-ci du sol, je n'ai plus le temps ni le loisir de penser à toi
un ivrogne titubant d'instinct retrouvera son foyer avant que moi je n'aboutisse où que ce soit
ça ne sert à rien de continuer ainsi, mais si l'on ne peut s'arrêter - si l'arrêt n'est pas au rendez-vous?j'esquisse quelques pas hasardeux dans l'éphémère et on peut dire ce qu'on voudra, ça ne fera jamais une danse
ça ne fera rien du tout - qu'on me remplace donc par quelque chose ou bien une autre, que la vie comment dire... m'imagine autrement
: on n'a qu'une chance sur deuxquel dérisoire funambule je fais, sur ce mince fil de conscience distinguant à peine le vide du chaos
quelque chose me dit qu'on m'arrache les ailes, qu'on est en train de passer mes ailes à la découpe et je ne sais pourquoi j'en éprouve un étrange soulagement
la légèreté de la chute rapatriera mes os au firmamentj'ai probablement tort de m'inquiéter - au crépuscule tous les lapins sont gris (ils me narguent de sous la haie)
je ne sais plus quoi faire de ma mémoire, je ne sais plus en sortir non plus. errer exigerait de commettre un pas devant l'autre, d'extirper de quelque intériorité supposée l'élan, la vaillance, la bravoure et pourquoi pas l'audace...
tout simplement parce qu'elle n'existe pasdemander brutalement à quiconque pourquoi il existe le jetterait subitement dans un trou de mémoire
je m'éloigne de mon rêve à la manière douce et irréversible d'un vaisseau spatial, j'aimais beaucoup tes cheveux longs, de cette couleur indéfinie, comme incolore des filles de nos villes
je ne retournerai plus chez moi, ni ailleurs - je crois que mon souffle se brise là, dans la lenteur exquise
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détourner le regard, les yeux froids d'un bleu si froid, ne pas y penser
ne pas y penser du tout, à tort et à travers supportant le secret, l'absolue limpidité d'un tel néant ou la révélation, fortuite,
d'une absence en tout lieu. jenny dort dans son litla mémoire redonne un peu de souffle à l'éternité coincée dans l'expérience continue que l'être fait de soi quand l'être sur soi ouvre tout grand les yeux
d'un chagrin sans objet - je reviens tellement en arrière que l'arrière n'existe plus
ni l'avantmourir génère la seule présence à soi possible, c'est à dire la présence absolue à l'absence absolue
mourir réunit dieu et le néant dans un même coït, et l'homme, tout autant que le rat je suppose,
s'en mord la queuec'est pas grave si l'on se ment à soi-même d'un bout à l'autre de la journée, de l'année et du siècle - se mentir assure une bonne circulation du sens et préserve d'un virus de la pire espèce: de la vérité quand elle se sent perdue et contrainte
de se démontrerles failles rembourrées, je n'ai plus rien à dire, puisque plus rien à m'avouer
les cils froncés et les oreilles rabattues d'un âne le font ressembler à un bolide en panne d'essence, j'ai fouillé tout mon quartier et dieu merci,
je n'y ai rien trouvé...
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tu sais plus ce que tu dis, tu bafouilles tu gribouilles, tu chantouilles comme une couille
je cherche l'âme de mon père et je ne trouve rien
je cherche la terre de mon père et je ne trouve rien
je cherche l'océan et j'y découvre
une mer de silence...la beauté nue, comment la beauté nue, je me grimais de brou
de noix et de noisette, ma simplicité simplement
n'en avait l'air, ou n'y ressemblait pas, j'ai été dans les îles
les îles n'y étaient plus
d'ailleurs elles n'en furent
jamais desparce qu'on est seul
à se comprendre ou presque, en tout cas à s'entendre, à s'entendre et j'entends presque rien je veux
rentrer chez moi, là-bas,
où jamais je n'accosteet qu'est-ce que tu as fait de moi - me perdre dans les bois? mais le bois a brûlé,
le bois a crucifié et j'étais même pas là, j'étais au kaféné quand on l'a crucifié
j'étais même pas là, quand le bois a brûlé...dieu parmi les âmes, dieu parmi les tombes j'ai rien fait je te jure, je n'ai jamais fait qu'attendre
ce qui n'est pas venu, j'avais tout un pêcher dans la cour, il a donné des pêches
- j'héritai des pelures, et de quelques noyaux...ne reste qu'un souffle et même pas: la buée sur le miroir et même pas: les yeux d'un loup vous épiant du fond de votre propre nuit mais sans vous voir, ni déchiffrer en vous le signe probant
d'une quelconque histoire...
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tu ne fais que vivre, comme si exister pouvait se réduire à un simple phénomène naturel,
de la cigarette sans nicotine, un christ sans sa croix - pire encore: du temps
qui ne serait à perdre...j'ai oublié quelque chose je ne sais plus où je ne sais plus quoi
la tête en l'air le soleil à demi-nu (une nymphe ou un démon s'est rompu le nombril), j'ai du laisser là-bas, quelque part,
un homme perdant pied, les trous noirs en pensifs, une limite déraison probablement
d'être, d'être malgré toutle vent s'est levé, la poussière avec lui - il faut enfin que je rentre
chez moi, chez moi enfin - il fait trop lourd, et trop lourd se lève, hébété dans l'espace
cérébral ou est-ce trop demander, de ma mémoire et caetera, j'aurais voulu être un hippie
tant pis...je retourne chez moi
pas à pas et plus je m'en éloigne, je retourne chez moi
même si ça n'existe pas, je retourne là
où ça n'existe pas, je retourne chez moi, ce tristement beau nulle part
où je n'existe pas, je retourne chez moi te dis-je
- j'ai même cueilli des fleurs...loup y es-tu, ça fait tellement longtemps, tellement longtemps tu sais
que je t'attends, penchant vers toi ma trogne, humide de lèche-moi l'trou
loup y es-tu, amant d'un soir de pluie, frère d'une âme en déroute, tu m'achèveras je sais
par pitié quand je t'en supplierai, le temps mûrit laisse-moi encore un peu
avoir peur à l'idée un peu, que j'eus pu être moi, loup veillant du fond des bois
sur les orées, les aurores boréales - ou comment se nomme t-elle?...
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il n'a pas plu dimanche
j'ai retiré la cire de mes oreilles, mes orbites mon âme bref, je pensais même voler... pourvu qu'il y eut du vent
le vent n'a pas soufflé, dimanche resta calmej'ai saisi la raison, il n'y en avait pas
squelette de poisson, joli squelette gentil poisson - quelques bulles de regret
pas plus que ça, pas plus de ci que ça non plusun soleil s'est couché, il était fatigué sans doute
ou défoncé les g'noux à coups d' marteau, ou d'avoir trop erré
- quand est-ce qu'on sait chéri, chéri mon beau mendiant, sait qu'on a trop erré?ce qu'il reste quand il
ne reste rien, tout porte le sens
d'une telle nécessité, l'infinalité pure
de n'être pas
celui qu'on ne sera
jamais, ni un autrenon je n'ai pas
pitié, d'ailleurs le lit est trop étroit
pour cela, pour autre chose aussi.
ai-je peur du noir? me console en pensant
que lui bien davantagehomme ou animal, crève la gueule ouverte
et le souvenir vide
- comment suis-je à ce point devenu insensible
à la grâce de vivre, tandis que je la sens
jaillir de chaque pore, se glisser par les fentes
et toute penteil n'a pas plu dimanche, le temps s'est maintenu - mais où ailleurs qu'en soi?
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le monde existe par chacun d'entre nous, dit-on
chacun d'entre nous en résume l'expérience unique, irréversible
or en moi le monde est mort - je suis
la tombe du soldat nu, l'univers anonyme, en moi le monde rumine
son immense néant, je suis croix, taillée dans le bois
d'un dieu sans espérance, le vide où lentement
le vide se consume, dit-on...quatrième jour dans la grotte et toujours rien
rien et toujours rien, le quarante-millième jour - j'étais enfant je crois, lorsque me fut ôtée
non la vue, mais l'image
non la joie, mais l'ivresse d'en jouir
ainsi quoique incurablement présent je manquais à l'appel, la liste des noms défilant
dans le noir et sans le sonla longue, œuvre de clandestinité - tu vas attraper froid dans les bois, et y a plus de mouchoirs,
y a plus de mouchoirs pour rien, tout bande en ma mémoire - sauf les larmes, d'odile en ma mémoire
j'ai fait du thé pour nous réchauffer
parce que je n'avais rien d'autre, je n'ai jamais rien d'autre, pour nous réchaufferla fin de cette histoire tu la connais déjà, car c'est fatidiquement post mortem, ou à titre posthume
que l'on meurt et demeure, la nuit éternelle rabattue sur soi ou au contraire le sexe à l'air, à l'air méchant
à qui donc en vouloir: il n'y a personne ici, personne à qui montrer ses dents, et le tu que j'invoque, équivoque,
c'est celui dans la glace, portant à son visage les doigts d'un regard rapiécé et n'y trouvant
que dalle...
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